100 au départ, un seul à l’arrivée, pour tous les autres, une balle dans la tête. Telle est la règle simple et radicale de la Longue Marche.
D’abord publiée sous son pseudo Richard Bachman, King s’interroge ici
sur la base même de la vie et le constat est imparable : on marche ou
on crève.
Tout au long de l’expédition, il va traiter des innombrables
interrogations de ses personnages, tous des ados. C’est ainsi qu’il
analyse le passage à l’âge adulte, la prise de conscience que nous ne
sommes pas éternels et de devoir mourir un jour, l’envie et l’espoir de
faire quelque chose de sa vie avant que nous n’en n’ayons plus la
possibilité, la prise de conscience du bonheur, aussi simple soit-il,
qui nous entoure.
Au fur et à mesure que les kilomètres s’étirent, la folie guette et
gagne les esprits. Le verdict est violent, sans appel. Trois
avertissements et c’est une balle dans la tête avec une froideur
calculée, un désintéressement total de l’armée encadrant les
participants, avec à sa tête le commandant, la figure paternelle absente
dans les moments les plus éprouvants de l’expédition.
Comme il le fait dans toute la première partie de sa carrière,
Stephen King analyse une fois de plus les relations entre parents et
enfants. Sauf qu’ici, il s’intéresse principalement au père, le plus
souvent absent dans la vie des participants ou alors sans grande
envergure, une grande gueule qui n’a pas le courage de ses opinions, par
crainte d’être enrôlé.
Emprunt de grandes réflexions, abordant des sujets variés à la base
de toute vie d’adolescent, King prend le taureau par les cornes et
n’hésite jamais à parler ni du plus redoutable ni du plus atroce.
Même si je reconnais l’indéniable qualité du roman et de son propos,
il y a tout de même quelque chose qui me gêne au plus haut point dans ce
récit. Qu’il s’agisse d’une dystopie n’est pas un souci : une fois le
décor planté, on entre dans l’univers avec les règles nouvellement
établies. Ici, mis à part quelques détails qui nous poussent à penser
que nous ne sommes pas à notre époque mais dans un futur plus ou moins
proche, il n’y a aucun moyen permettant d’ancrer le récit précisément,
ce qui rend le contenu intemporel.
Quoi qu’il en soit, ce n’est pas ce qui m’aura dérangé. Non, ce qui
m’a gêné c’est le fait que ces 100 participants s’inscrivent à une
marche pour gagner un prix dont ils ignorent tout ou presque et en
sachant qu’ils n’auront qu’une chance sur 100 d’être le vainqueur. Ils
savent que pour tous les autres, se sera le sac à viande froide et pas
une simple élimination.
Pour moi, c’est inconcevable qu’un personnage puisse agir de la
sorte. Il n’a aucune carotte assez grosse pour lui permettre de
provoquer la mort à ce point. Une seule solution dans ce cas : tous sont
suicidaires. Mais si King aborde le sujet à un moment donné, on
comprend que ce n’est pas le cas. Ils savent ce qui les attend, ils
partent en toute connaissance de cause et pourtant ils ne savent pas ce
qu’ils font. Ils acceptent l’idée du suicide qu’en dernier recours,
parce qu’ils n’ont pas trouvé la réponse à leur engagement. Alors
certes, se sont des ados et bien souvent on dit que les ados ne savent
pas ce qu’ils font mais au delà du cliché, même un ado à l’instinct de
conservation. Pour moi, le principe ne tient pas la route et du coup ce
récit n’a aucune raison d’être dès le départ. Si la métaphore sur ce
qu’est notre vie est parfaitement assimilée (marche ou crève), il ne
faut pas oublier un point important : nous n’avons jamais demandé à
venir au monde. Nous n’avons pas eu le choix. Les participants, eux,
l’ont eu. Et pour moi, ça fiche tout en l’air, amoindrissant l’impact de
la leçon qui suit sur 350 pages.
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